Sous la co-direction de (par ordre alphabétique) :

Sonia De Grand’Maison, T.S.,Art-thérapeute et psychothérapeute, Membre de la nation Pekuakamiulnuatsh

Jean-Martin Deslauriers, T.S., Ph.D., Professeur, École de service social, Université d’Ottawa

Frédérik Gagnon,M.T.S., Candidat au doctorat, École de travail social, Université de Montréal

Josée Grenier,T.S., Ph.D., Professeure, Département de travail social, Université du Québec en Outaouais, Campus St-Jérôme

Célyne Lalande,T.S., Ph.D., Professeure, Département de travail social, Université du Québec en Outaouais, Campus Gatineau

Isabelle Le Pain, Ph.D., Professeure, École de travail social, Université de Sherbrooke

1. Un monde en proie à de grands boulversements

Aujourd’hui, il est presque devenu un truisme de déclarer que le contexte mondial actuel est en profonde transformation. Depuis plus de 20 ans, de nombreux observateurs et observatrices en travail social issu.e.s de la scène internationale, mais également nationale, interpellent les États et les acteurs de la société relativement aux conséquences délétères de la globalisation des systèmes économiques, de la montée du néolibéralisme, des conflits armés, des changements climatiques ainsi que de l’accroissement des inégalités sociales et économiques (Dominelli, 2012 ; Judd et al., 2015 ; Reisch, 2013). Au cours des dernières années, ces profondes transformations semblent avoir pris de l’ampleur. Elles s’accompagnent de grands bouleversements sociaux, sanitaires, économiques, politiques et écologiques et obligent du même coup le travail social à trouver des réponses inédites à ces nouvelles réalités (FITS, 2020 ; Kenkel, 2020).

À ce titre, on ne peut passer sous silence la pandémie de COVID-19, qui, depuis 2020, s’est imposée de manière drastique dans tous les pays du monde et a engendré d’importants bouleversements sociaux et économiques (OMS, 2020). Sur fond de crise sociosanitaire se profilent par ailleurs d’autres grands bouleversements, ceux issus des changements climatiques, qualifiés par l’OMS comme étant la plus grande menace pour la santé dans le monde (2021). Les changements climatiques ont également une incidence sur les mouvements migratoires et l’accroissement du nombre de réfugiés climatiques (Drolet et al., 2022) en plus d’avoir des répercussions sur la culture, l’organisation sociale et le bien-être des communautés autochtones (Watts-Cloutier, 2019). À cet effet, selon le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), les connaissances ancestrales de la nature qu’ont les communautés autochtones font partie intégrante des réponses susceptibles de venir limiter ces effets délétères (Intergovernmental Panel on Climate Change, 2022).

Parallèlement à ces grands bouleversements sociosanitaires, les dernières années ont également été marquées par des événements ayant suscité indignation, révolte et résistance face à la prégnance de la discrimination basée sur le genre ou liée à la diversité sexuelle (Maschi et al., 2022), du racisme systémique (Groguhé, 2020) ainsi que des effets destructeurs des politiques coloniales passées et actuelles (CREP, 2020). Pensons au décès de l’Afro-Américain George Floyd, survenu en 2020 à la suite d’une interpellation policière qui a remis à l’avant-scène les violences et discriminations policières commises à l’égard des personnes noires tout en embrasant les mouvements de contestation et de défense des droits tels que le mouvement Black Live Matter (Nayak et al., 2022).

La mort tragique et évitable de deux enfants au Québec, en mai 2019 et en mars 2020, tous deux suivis en protection de la jeunesse, a ramené à l’avant-plan les lacunes et les défis du système de protection de la jeunesse et des services qui y sont reliés. Ces événements tragiques ont provoqué le déploiement de la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse (CSDEPJ, 2021), qui a recommandé une refonte en profondeur des services à l’enfance et à la jeunesse ainsi que la reconnaissance du droit pour les Premières Nations et les Inuit à l’autodétermination et à l’autonomie gouvernementale en matière de protection de la jeunesse.

Mentionnons aussi la découverte de quelques centaines de tombes anonymes sur des sites d’anciens pensionnats autochtones au Canada (Dufranne, 2022). À cet effet, lors de sa venue au Canada et au Québec en juillet 2022, le pape François a présenté ses excuses aux peuples autochtones et a demandé pardon pour les abus commis par certains membres de l’Église ainsi que pour la destruction culturelle et l’assimilation forcée, tout en reconnaissant comme génocide les abus subis par les communautés autochtones dont les enfants ont été forcés de fréquenter les pensionnats (Radio-Canada, 2022). Soulignons également les circonstances tragiques entourant le décès de l’Atikamekw Joyce Echaquan en 2020 à l’hôpital de Joliette alors qu’elle y recevait des soins. Son décès a remis le racisme systémique et la discrimination envers les Autochtones au sein des services publics à la une des tribunes (Bureau du coroner, 2021). En réaction à cet événement, le Conseil des Atikamekw de Manawan et le Conseil de la Nation Atikamekw ont proposé le principe de Joyce, c’est-à-dire un appel à l’action qui promeut entre autres le droit équitable pour les peuples autochtones à recevoir sans discrimination des services de santé et services sociaux, de même que la reconnaissance et le respect des savoirs et connaissances traditionnels et vivants des Autochtones en matière de santé, tout en préconisant la sécurisation culturelle des Autochtones au sein des organisations de santé et des services sociaux (Conseil des Atikamekw de Manawan et Conseil de la Nation Atikamekw, 2020). Toutefois, ce principe, tout comme le racisme systémique, n’a pas encore été reconnu par le gouvernement du Québec.

Il va sans dire que l’adoption par de nombreux États de différentes politiques néolibérales, dont des politiques d’austérité, n’a fait qu’affaiblir les dispositifs de protection sociale. Conséquemment, les réponses visant à faire face par exemple, aux changements climatiques ainsi qu’à l’appauvrissement de certaines franges de la population et aux inégalités croissantes s’en sont trouvées moins adéquates (Ferguson et al., 2013). Pour compléter ce panorama, mentionnons la prégnance de nombreux problèmes sociaux qui sont de plus en plus invisibilisés par les pouvoirs publics et les programmes de protection sociale, mais qui, loin d’avoir disparu, s’accentuent et se complexifient. On peut penser par exemple à la pauvreté, à l’exclusion sociale, à la marginalisation croissante des personnes vulnérables, aux différentes formes de maltraitance, à l’immigration ou encore aux problèmes de santé mentale chez les jeunes ou les adultes.

2. Du côté du travail social au Québec

Les nombreux bouleversements mondiaux qui viennent d’être évoqués à grands traits se répercutent au Québec et ont des effets indéniables sur le travail social, lequel, rappelons-le, est déjà mis à rude épreuve depuis plus d’une dizaine d’années en raison du couple État social – travail social qui vacille (Castel, 2009).

Travail social et bouleversements sociosanitaires

Au Québec, la pandémie de COVID-19 a mis en lumière et parfois même exacerbé les problèmes sociaux préexistants (Observatoire québécois des inégalités, 2020). Pensons à l’isolement des personnes aînées ayant besoin de soutien pour conserver leur autonomie, à la marginalisation des communautés autochtones, à la violence conjugale et familiale, aux problèmes liés à la santé mentale et à la toxicomanie, à l’itinérance, au décrochage scolaire, au manque chronique de logement abordable et salubre, à l’appauvrissement accru de la population et à l’accroissement des inégalités sociales (Baral et al., 2021; Comité consultatif de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, 2021 ; DRSP, 2021 ; Dusseault et al., 2020 ; INSPQ, 2021; Lavergne et al., 2020 ; Saint-Girons et al., 2020).

La pandémie a révélé les nombreuses failles du Réseau de la santé et des services sociaux (RSSS), en particulier en matière de modes de gouvernance et d’organisation des services en CHLSD (Commissaire à la santé et au bien-être, 2022 ; Protecteur du citoyen, 2021). La pandémie a aussi affecté les structures de concertation existantes, par exemple dans les champs d’activité de l’aide alimentaire ou de l’itinérance (Leblanc et al., 2020 ; Tremblay et al., 2022). Les acteurs de ces champs ont dû revoir leurs priorités et modes de fonctionnement afin de répondre aux besoins émergents ou croissants des communautés (Opération veille et soutien stratégiques et Collectif des partenaires en développement des communautés, 2021). Rappelons que lors des premières vagues de la pandémie, les organismes communautaires ont été des acteurs essentiels pour pallier le manque de service du RSSS permettant de soutenir les personnes en situation de vulnérabilité (Maltais et al., 2022) en plus de déployer tous les efforts et moyens pour poursuivre leurs propres missions. De plus, au plus fort de la première vague, une partie des services d’organisation communautaire en CIUSSS et CISSS ont été délestés, ce qui a eu un impact certain sur les pratiques d’action collective et les services (Leducq et al., 2020).

Plus largement, du côté du travail social, les impacts de ces bouleversements sociosanitaires se font encore sentir. Lors de la première vague, le délestage et la réduction au minimum des interventions en face à face en raison des mesures sanitaires ont entraîné une réduction des services (Bourque et al., 2020), aggravant des situations déjà critiques, par exemple dans les services jeunesse, en santé mentale et auprès des personnes aînées. Par ailleurs, l’après-crise pandémique révèle les limites importantes du modèle managérial appliqué aux métiers du care (Benoit et al., 2022). On peut dès lors se demander comment les coûts engendrés pour faire face à la pandémie affecteront les services rendus aux personnes vulnérables dans une culture d’efficience qui risque de pousser toujours plus loin la logique de la rationalisation.

Les bouleversements dans les services sociaux et le rôle de l’État

Depuis les 25 dernières années, le Québec a connu un recul progressif, constant et majeur dans l’offre de services sociaux fournis par l’État à la population. À ce titre, les périodes d’austérité budgétaire qu’a connues le Québec ont engendré un désinvestissement substantiel dans toutes les composantes des services sociaux. Parmi les répercussions, on trouve un affaiblissement de l’offre de services sociaux généraux, le démantèlement des services sociaux de première ligne (Grenier et al., 2014) et la fragilisation de l’action collective territoriale, notamment dans les structures qui soutiennent les démarches de développement des communautés (Lachapelle et al., 2020).

Par ailleurs, les dernières réformes centralisatrices de l’État soulèvent des enjeux de taille, dans un contexte marqué par la montée du néolibéralisme, les réformes successives soutenues par la nouvelle gestion publique transformant l’État social en État managérial (Bellot et al., 2013 ; Grenier et al., 2018). Du côté des politiques de protection sociale, en effet, l’État se rétracte de plus en plus, négligeant ses responsabilités envers la population. De plus, on assiste à la privatisation des services publics, dont les services sociaux (Hébert, 2022) alors que d’autres acteurs comme les fondations philanthropiques et les organismes de bienfaisance créent ou soutiennent de nouvelles formes de services et d’interventions sociales (Gagnon et al., sous presse).

Conséquemment, les services sociaux généraux se raréfient au profit de services spécialisés obtenus par l’intermédiaire d’un diagnostic. La lecture dominante des problèmes sociaux est médicale, les explications sont reliées à l’individu et renvoyées à ses responsabilités au détriment d’une lecture sociale axée par exemple sur les déterminants sociaux de la santé, les conditions de vie ou les liens sociaux, ou encore d’une lecture fondée sur une approche holistique de la santé autochtone (Bryson et al., 2018 ; Clarke et al., 2020 ; INSPQ, 2021). Par ailleurs, la plupart des services sociaux québécois reposent principalement sur une approche curative plutôt que sur des approches qui misent davantage sur la promotion et la prévention (Grenier et al., 2014).

La gouvernancedu RSSS est, elle aussi, de plus en plus remise en question. Les besoins exprimés et les réalités sociales et communautaires locales ne sont généralement plus le point de départ de l’élaboration de l’offre de services, malgré quelques initiatives prometteuses dans certaines régions du Québec (Morin et al., 2014). Dans une logique de traitement, les services de proximité axés sur les communautés locales sont délogés. Enfin, les redditions de compte ne reflètent pas la réponse aux besoins cliniques, les indicateurs de gestion n’étant pas adaptés aux spécificités des pratiques sociales (Hubert et al., 2016). On assiste donc à une quantification d’actes techniques au détriment d’une posture professionnelle réellement axée sur les besoins des usagers.

Du côté de la culture organisationnelle, celle-ci met à mal les pratiques professionnelles, dont le travail social, et concourt également à l’effritement des services sociaux. Avec la création des CIUSSS et des CISSS découlant de la réforme Barrette en 2014-2015, il y a eu un accroissement de la mobilité du personnel au sein des nombreux établissements ainsi que de multiples départs et des difficultés majeures de rétention du personnel. On constate conséquemment une érosion de l’expertise dans différents domaines sociaux ainsi que de nombreuses ruptures de liens essentiels au travail social. On a aussi constaté la disparition des associations d’établissements, un accroissement de la culture de gestion top down, une perte de la proximité décisionnelle par les praticiens ainsi qu’une perte de sens face à ce travail dénaturé (Grenier et al., 2016 ; Le Pain et al. ; 2021). Le jugement clinique et l’autonomie professionnelle ainsi que la qualité et la pérennité des liens avec les personnes qui reçoivent les services sont mis à mal. L’encadrement des pratiques se fait en fonction de règles administratives, réduisant du même coup les occasions d’analyser les besoins des personnes, les pratiques et la relation d’aide selon une perspective réflexive (Ferguson et al., 2020). Qui plus est, les approches tiennent peu compte de la sécurisation culturelle, notamment en protection de la jeunesse (Guay et al., 2022). Résultat : les services sociaux peinent à offrir des réponses adéquates en soutien aux besoins de la population. Ces constats et les questionnements qui en découlent stimulent par ailleurs le développement de la réflexion éthique en travail social (Gonin et al., 2022).

Un bouleversement du côté des réformes législatives

Il est aussi important de mentionner qu’au Québec et au Canada, plusieurs lois ayant un impact sur le travail social ont été introduites ou réformées. Certaines d’entre elles proposent un changement de paradigme dans la compréhension des problématiques et dans les réponses à celles-ci. Pensons à l’entrée en vigueur en 2014 de la Loi sur les soins de fin de vie et à ses nombreux amendements et modifications tendant à élargir l’accessibilité au droit à mourir dans la dignité. La loi fédérale C-92 (Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuit et des Métis) en vigueur depuis le 21 juin 2019, qui reconnait aux communautés autochtones la compétence de légiférer et d’administrer les services pour les familles autochtones en matière de protection de la jeunesse, offre un autre exemple de changement législatif majeur impactant la profession.

D’autres lois sont venues encadrer juridiquement la profession. Par exemple, la Loi modifiant le Code des professions et d’autres dispositions législatives dans le domaine de la santé mentale et des relations humaines, entrée en vigueur en 2009, est venue préciser et encadrer le champ d’exercice des travailleurs sociaux. Cette loi réserve à certains professionnels, dont le travailleur social (en partage ou de façon exclusive), la pratique d’activités qui sont considérées comme étant à haut risque de préjudice. Par exemple, l’évaluation psychosociale d’une personne dans le cadre des régimes de protection du majeur ou du mandat de protection constitue une activité réservée exclusivement aux travailleuses et travailleurs sociaux. Avec la modernisation de la loi sur le Curateur public sous l’impulsion de la Loi modifiant le Code civil, le Code de procédure civile, la Loi sur le curateur public et diverses dispositions en matière de protection des personnes adoptée en 2020, l’évaluation psychosociale effectuée par les travailleuses et travailleurs sociaux devient une activité encore plus spécifique et complexe, interpelant au plus haut point le jugement professionnel du ou de la travailleuse sociale. Par ailleurs, la Loi visant à renforcer la lutte contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité ainsi que la surveillance de la qualité des services de santé et des services sociaux influe sur le travail social en introduisant notamment le signalement obligatoire de certains cas de maltraitance.  

D’autres lois élargissent et diversifient le champ d’action du travail social. Mentionnons, à titre d’exemple, la Loi modifiant diverses dispositions en matière de procréation assistée, la Loi visant à reconnaitre et à soutenir les personnes proches aidantes, le projet de loi n° 2, Loi portant sur la réforme du droit de la famille en matière de filiation et modifiant le Code civil en matière de droits de la personnalité et d’état civil. Par ailleurs, différents aspects du système judiciaire ont été réformés, notamment par l’adoption du projet de loi 92, Loi visant la création d’un tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et de violence conjugale.

Enfin, on ne peut passer sous silence le déploiement de commissions de grande envergure qui viennent interpeler directement le travail social, notamment à propos de la formation et de l’offre de services. Pensons à la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse (2021), dont nous avons fait mention précédemment. Soulignons également le rôle de la Commission de vérité et réconciliation (CVR, 2015) et de la Commission d’enquête sur les relations entre les autochtones et certains services publics (CREP, 2020) afin de mettre en œuvre des actions concrètes pour éliminer la discrimination des peuples autochtones et promouvoir la sécurisation culturelle. Ces deux dernières commissions ciblent directement le travail social sur les plans de la formation et de l’offre de services, et cela dans une perspective de reconnaissance des pratiques coloniales passées et actuelles et de décolonisation des pratiques et des savoirs de la profession.

3. Un appel à la mobilisation et à l’engagement

Près de 25 ans après les premiers états généraux du travail social et près de cinq ans après Le travail social dans tous ses états[1], l’Ordre souhaite rassembler ses membres et les partenaires concernés pour réfléchir et discuter des orientations collectives à adopter afin que le travail social joue son plein rôle dans les années à venir. C’est ainsi que les États généraux du travail social (ÉGTS) ont été lancés, considérant que la société est soumise à de grands bouleversements économiques, climatiques, politiques et sociaux. Le contexte actuel étant toujours en évolution et en transformation, il devient nécessaire de prendre des actions concrètes pour repositionner le travail social dans la société québécoise avec tous les acteurs et actrices concernés, y compris les Premières Nations et les Inuit.

Dans ce cadre, la revue Intervention souhaite participer à cette démarche en mobilisant tant les connaissances théoriques issues de la recherche que les connaissances pratiques. Elle sollicite à cet effet des contributions sous la forme d’articles de fond, de récits de pratique ou de débats et analyses critiques s’articulant autour des quatre grands axes suivants :

1. Effritement de l’État et réorientation des politiques publiques : les répercussions sur les services sociaux, le travail social et les populations

  • Comment le travail social est-il mis à l’épreuve par les transformations actuelles de la protection sociale et la restructuration de l’État? Autrement dit, de quelles manières le travail social est-il confronté dans sa pratique étant donné l’érosion actuelle de la mission sociale de l’État?
  • Comment les changements en matière de gouvernance du Réseau de la santé et des services sociaux influent-ils sur le travail social?Comment les réponses proposées par les politiques publiques viennent-elles moduler la mission, les valeurs et les pratiques en travail social? Ces réponses politiques correspondent-elles aux lectures et aux formes d’accompagnement propres au travail social?
  • Les réponses proposées par les politiques publiques et les services sociaux correspondent-elles aux besoins et aux réalités des populations? Quels modèles prometteurs pourraient faciliter l’accès de la population aux services sociaux?
  • Est-ce que les personnes, les familles, les groupes et les communautés, dont les plus vulnérables et marginalisées, sont rejointes et se sentent accompagnées, soutenues et incluses par les praticiens en travail social, et peuvent-elles participer à l’élaboration des solutions ?
  • Pour les Premières Nations et les Inuit au Québec, comment les enjeux sociaux actuels dans les diverses communautés, les démarches d’autodétermination dans les services à la population ainsi que les transformations politiques provinciales se répercutent-ils sur le travail social en communauté ?

2. La pratique du travail social au quotidien : forces, défis et avenues prometteuses

  • Quels sont les défis et les enjeux se situant à la jonction de l’encadrement juridique, théorique, administratif et professionnel des pratiques en travail social ?
  • Où en est le travail social plus d’une décennie après l’entrée en vigueur de la Loi modifiant le Code des professions et d’autres dispositions législatives dans le domaine de la santé mentale et des relations humaines, par exemple sur le plan de l’identité professionnelle, de la collaboration interprofessionnelle, des actes réservés, de l’évaluation du fonctionnement social et du décloisonnement des professions?
  • Quels sont les espaces à redéfinir et à investir en travail social en regard des récentes réformes législatives touchant les services sociaux ?
  • Quelles sont les conséquences des réformes du réseau de la santé et des services sociaux sur les conditions de pratique des travailleuses et travailleurs sociaux?
  • Quels sont les enjeux rencontrés en ce qui concerne le sens et la finalité des pratiques dans l’exercice de la profession ?
  • Comment les pratiques émergentes en travail social (pensons par exemple à la télépratique, à la pratique autonome, aux pratiques centrées sur la nature et l’aventure, au travail écosocial ou encore aux approches décoloniales, anti-oppressives et participatives) permettent-elles de répondre aux enjeux actuels ? Quels enjeux soulèvent-elles ?
  • Quels sont les impacts des nouvelles technologies et de l’intelligence artificielle sur les pratiques professionnelles ?

3. La perspective du changement social : une place renouvelée?

  • Où en sommes-nous en ce qui concerne le rôle de l’activisme, du militantisme et de la participation du travail social aux mouvements sociaux ?
  • Est-ce que la réponse aux besoins individuels et l’engagement dans le changement social sont toujours en opposition aujourd’hui ? Quelle est la place occupée par l’action collective en travail social ?
  • Quels sont les enjeux actuels rencontrés par le milieu communautaire et quels en sont les impacts sur les pratiques des groupes ?
  • Quelles sont les pratiques novatrices déployées par les organismes communautaires pour mieux répondre aux besoins de la population ?
  • Comment les pratiques d’action collective se réorganisent-elles dans le contexte post-réforme (et post pandémique) pour soutenir le développement des communautés et agir sur les déterminants sociaux de la santé des populations ?

4. La formation

  • De quelle manière la recherche dans le domaine du travail social contribue-t-elle au renouvellement des pratiques et à l’élaboration des pratiques?
  • Comment les diverses instances de formation en travail social inscrivent-elles les nouvelles problématiques, l’évolution des paradigmes et les changements introduits par les lois dans les curriculums de formation? Quels sont les défis rencontrés et les forces en présence?  
  • Quelles sont les nouvelles formes d’apprentissage et de soutien contribuant à la formation initiale et continue en travail social?

Numéro à paraître à l’automne 2023

Date de tombée des résumés (350 mots maximum) : 9 janvier 2023
Date de tombée des articles : 16 mai 2023
Courriel : revue.intervention@otstcfq.org

Pour plus d’informations, vous pouvez communiquer avec :

Sarah Boucher Guèvremont, T.S, Rédactrice en chef, revue Intervention
Courriel : sbguevremont@otstcfq.org

RÉFÉRENCES

Baral, S., Bond, A., Boozary, A. et al. (2021). En quête d’un refuge : l’itinérance et la COVID‑19. Une note de breffage de la SRC. Société Royale du Canada. https://rsc-src.ca/sites/default/files/Homelessness%20PB_FR_0.pdf?utm_campaign=Veille%20scientifique%20&utm_medium=email&utm_source=Revue%20newsletter

Bellot, C., Bresson, M. et Jetté, C. (2013). Le travail social et la nouvelle gestion publique. Presses de l’Université du Québec.

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Dominelli, L. (2012). Green social work: from environmental crises to environmental justice. Polity Press.

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[1] https://www1.otstcfq.org/l-ordre/evenements-et-campagnes/le-travail-social-dans-tous-ses-etats/