Lorsqu’on désire se familiariser avec une profession comme le travail social, il peut s’avérer utile de parcourir des dictionnaires et des encyclopédies spécialisés en la matière. En nous basant sur les commentaires d’étudiantes1 qui ont assisté à nos cours depuis les 10 dernières années2, c’est là le postulat que nous défendrons dans ce court texte. Nous aborderons, dans l’ordre, les raisons qui ont poussé ces étudiantes, à un moment ou un autre de leur cheminement scolaire, à avoir recours à ce type d’ouvrages, dont une encyclopédie en particulier : l’Encyclopedia of Social Work des Presses de l’Université d’Oxford. Nous exposerons aussi ce que cette trouvaille a pu générer dans leur cheminement scolaire et expérientiel.
En nous attardant aux raisons qui ont motivé les étudiantes à consulter un tel ouvrage encyclopédique, on retrouve une dominante : celle de vouloir se familiariser avec un langage spécifique au domaine du travail social. Nous avons constaté avec étonnement que quelques étudiantes ont eu recours à l’encyclopédie avant même de débuter leur formation. Guidées par leur intérêt pour la profession, elles ont d’abord parcouru différents descriptifs des universités canadiennes présentant, sur leurs sites internet, les cours offerts, la mission, les objectifs et les valeurs de leurs programmes. C’est en fonction de ces contacts avec différents contenus d’information provenant des universités canadiennes qu’elles ont pu faire des regroupements de thèmes qui se répétaient d’une université à l’autre. Par exemple, elles désiraient en savoir davantage sur les valeurs de la profession, mais également sur l’émancipation des individus et des collectivités par les droits et libertés, sur la promotion de la justice sociale en travail social. C’est par leur effort de recherche sur internet qu’elles ont accédé à l’Encyclopedia of Social Work3.
D’autres étudiantes, plus nombreuses, ont indiqué que c’est au début de leur parcours universitaire, et après avoir mis la main sur des documents en provenance d’organismes de régulation de la pratique professionnelle, qu’elles ont découvert l’encyclopédie en question. Ces étudiantes, confrontées à des écrits normatifs et axiologiques comme des codes de déontologie, des référentiels de compétences ou des normes de pratique professionnelle ont, là encore, voulu se familiariser avec un type de discours en travail social. Plus spécifiquement, elles ont dit vouloir mieux comprendre ce qu’est la déontologie ou l’éthique professionnelle, la dignité humaine, la solidarité, l’égalitarisme, l’autodétermination, le fonctionnement social des individus et des collectivités, les sources de discrimination ou d’oppression, etc. Comme pour le groupe précédent, le désir de se familiariser avec des thèmes propres au travail social fut le déclencheur de recherches sur internet, lesquelles ont également mené à la découverte de l’encyclopédie.
Si la plupart des étudiantes qui ont pris connaissance de l’existence de cette encyclopédie l’ont d’abord fait dans le but de mieux se familiariser avec un langage spécifique au domaine du travail social, leur contact fréquent avec cette référence leur a aussi permis, au fil du temps, d’en tirer d’autres retombées. Notamment, elles ont ainsi pu :
- se familiariser avec l’objet d’étude et d’intervention du travail social, avec les valeurs, les normes et les principes ordonnateurs des conduites professionnelles auprès des individus, des couples, des familles, des petits groupes et des collectivités ;
- repérer plusieurs descriptions stabilisées de thèmes clés en travail social, tels que l’éthique professionnelle, la globalisation, le capitalisme financier, le néolibéralisme, le marché, la concurrence, le bien commun, la justice sociale, les droits et libertés, l’oppression, les privilèges, la pauvreté et les politiques sociales ;
- comprendre la différence entre divers types d’intervention : clinique, communautaire, de crise et auprès des femmes, des personnes dépendantes, des personnes âgées, des jeunes, etc.;
- connaître les principaux courants théoriques, les méthodes et les pratiques d’intervention auprès des individus, des couples, des familles, des petits groupes et des collectivités ;
- approfondir leur connaissance de la nature du travail social, de ce que font les travailleuses sociales dans l’exercice de la profession, ce qui a pu générer une capacité à démontrer la pertinence des activités professionnelles en contexte de travail interdisciplinaire (ancrage identitaire + champ de connaissances et de compétences en travail social) et dans la société ;
- mieux débattre des enjeux sociaux, politiques, économiques et culturels actuels et des défis posés à l’exercice professionnel au sein des organismes sociosanitaires ;
- mieux délimiter, dans leurs stages de formation pratique ou dans leurs cheminements de recherche, le champ d’expertise, les savoirs, les connaissances et les compétences propres au travail social ;
- demeurer critiques face aux différents courants de savoirs, de connaissances (théoriques, méthodologiques et pratiques) et de compétences qui s’appliquent à déterminer les conditions idéales d’exercice de la profession en travail social ;
- concevoir, à partir d’un horizon moral plus large, une société plus juste, un monde meilleur.
Il appert ainsi que pour les étudiantes à qui nous avons enseigné et grâce à qui ce court texte a pu voir le jour, l’Encyclopedia of Social Work fut une référence de premier ordre dans leur cheminement scolaire et expérientiel. Les connaissances et savoirs théoriques, méthodologiques et pratiques que renferme cette encyclopédie ont ainsi souvent été utilisés par les étudiantes : lors de conversations en classe, lors des stages de formation pratique, dans leurs processus de recherche ou dans tous leurs travaux scolaires écrits. Il fut agréable de les entendre raconter combien cette source encyclopédique leur a permis de parfaire les liens entre la théorie, la méthodologie et la pratique du travail social auprès des individus en situation.
La plupart étaient unanimes pour affirmer qu’elles ont apprécié le format de l’Encyclopedia of Social Work. En effet, selon les étudiantes, les textes thématiques sont écrits dans un langage abordable. De même, elles aimaient retrouver, à la fin de chaque texte en question, des références leur permettant d’élargir leurs connaissances des objets ou problématiques étudiés. Par exemple, si elles s’informaient sur un sujet comme l’oppression, elles aimaient explorer les références proposées aux lectrices en fin de texte. Cela, disaient-elles, leur permettait de pousser un peu plus l’analyse d’un sujet ou d’un thème propre au travail social. Cette seule caractéristique, qui a souvent été nommée, faisait en sorte que les étudiantes se tournaient vers cette référence encyclopédique plutôt qu’une autre pour réaliser leurs travaux.
Nous aimerions aussi préciser que de nombreuses étudiantes ne se sont pas limitées à utiliser l’Encyclopedia of Social Work. En effet, après s’être initiées à cette encyclopédie, elles ont rapidement voulu élargir ou comparer leurs découvertes avec d’autres encyclopédies ou dictionnaires spécialisés en travail social, dont les plus souvent cités sont reproduits dans le tableau qui suit :
En langue anglaise | En langue française |
Francis J. Turner, Canadian encyclopedia of social work, Waterloo, Wilfrid Laurier University Press, 2005, disponible en ligne dans les bibliothèques universitaires. John Pierson, Martin Thomas, Dictionary of Social Work, Londres, HarperCollins, 2002, 448 p. Robert Lee Barker, The Social Work Dictionary, 5e édition, Washington, NASW Press, 2003, 493 p. John Harris et Vicky White, A Dictionary of Social Work and Social Care, Oxford University Press, Oxford, 2014, disponible en ligne dans les bibliothèques universitaires. | Stéphane Rullac et Laurent Ott, Dictionnaire pratique du travail social, 2e édition, Paris, Dunod, 2015, 512 p. Brigitte Bouquet et Jean-Yves Barreyre (dir.), Nouveau dictionnaire critique d’action sociale, Paris, Bayard, 2008, 637 p. |
Bref, comme porte d’entrée au langage spécifique, à la pensée critique mais aussi aux savoirs et connaissances (idéologiques, axiologiques, normatives, théoriques, méthodologiques et pratiques) en travail social, il appert que l’Encyclopedia of Social Work4 s’est avérée utile pour faire penser (et agir) les étudiantes à qui nous avons enseigné au cours de la dernière décennie – des étudiantes qui sont ou seront prochainement diplômées et qui auront à exercer une profession marquée par des défis contemporains majeurs.
Notes
- Bien que l’appellation « travailleuses et travailleurs sociaux » soit la plus utilisée en travail social, nous avons pris la décision d’employer le féminin (travailleuse sociale, professionnelle, etc.) pour faciliter la lecture du texte.
- Dans les cours suivants offerts à l’Université Laurentienne : a) Théorie pour la pratique du travail social I ; b) Éthique et déontologie professionnelle en travail social ; c) L’usage abusif des stupéfiants : politique et traitement ; d) Stratégie pour le changement communautaire I.
- Cette encyclopédie est disponible en format électronique dans la plupart des bibliothèques universitaires qui offrent des programmes en travail social.
- Comme tous les documents spécialisés cités dans le tableau qui précède.